Je suis ailleurs.  Mon corps est flou.   J'ai perdu la notion du temps et je suis entourée de rien.   Il n'y a que cet autre moi, cet autre visage qui me regarde.   Yeux dans les yeux.   Pourquoi ce miroir?   Qu'a-t-il à m'apprendre?  Où suis-je?   Je détache mon regard du sien - du mien - et je regarde le visage devant moi.  Je suis hypnotisée par sa beauté.  Non, ce n'est pas moi... mais pourtant, je me reconnais dans son regard.  Elle ne semble pas étonnée de ma présence, mais moi je suis complètement ébaubie.  Elle a cette assurance dans le regard, cette prétention que je ne reconnais pas.  Je suis fascinée par ce spectacle, par cette rencontre incroyable.  Puis, elle me sourit et je n'aime pas ce que je vois.  Son beau visage se transforme.  Pourquoi cette cruauté dans les yeux?  Qui es-tu toi?  Pourquoi te permets-tu de m'effrayer et pourquoi y prends-tu plaisir?  Tu es habituée de te faire regarder, de te faire adorer, aduler peut-être, mais tu ne m'auras pas.  Je ne serai pas ainsi, le passé ne me rattrapera pas.  Je te quitte.

Voilà.  Je flotte.  Devant moi se trouve une maison blanche au toit noir.  Un mur de pierres avec une grille en fer sépare la route de terre du début du terrain de la maison.  De chaques côtés de la grille se trouvent 3 espèces de nains de jardin.  Deux verts et un bleu.  Ils semblent sortir de nulle part, tout comme les panneaux de limites de vitesse sur le bord de la route.  Encore une fois je ne sais pas trop où je me trouve.  J'essais de me souvenir.  Un sentiment de déjà-vu m'envahit, je suis déjà venue ici, il y a très longtemps.  Cela date peut-être d'une centaine d'années, mais pas plus.  Le décors semble dater du début de XXe siècle, à part les étranges anacronismes.  Soudain, la porte s'ouvre.  Des hommes vêtus de noir sortent de la maison.  Ils sont très silencieux.  L'ambiance est très lourde, comme dans un enterrement.  Une femme se trouve parmi eux, très digne.  J'attarde mon regard sur elle, je suis très intriguée par cette femme.  Elle aussi est vêtue de noir, mais elle porte une sorte de bonnet en dentelle blanc.  Visiblement, ces gens sont plutôt bien nantis.  La femme s'approche de moi et je la reconnais.
«Maman?»
Je n'en reviens pas...  Elle se tourne vers moi et me regarde.  Je ne savais pas qu'elle pouvait me voir!  Je suis de plus en plus étonnée.  Elle semble me reconnaître car elle me sourit sincèrement puis elle me dit:
«Oh!  Bonjour Marie-Clara!»
Elle se retourne et va rejoindre le groupe d'homme.  Marie-Clara?  Je m'appelle Marie-Clara.  Je dois m'en souvenir!  Mon intérêt se dirige de nouveau vers la maison.  Je marche vers celle-ci.  Tiens! je ne flotte plus...  Je grimpe les marche et j'ouvre la porte de bois.  J'entre.  C'est drôle, j'ai la même impression que si j'entrais dans la maison d'un parent décédé il y a longtemps et que tout était resté intact, sauf que là, je ne reconnaissais pas les lieux.  Je me dirige vers l'arrière de la maison.  Dans le fond, il y a un solarium et une petite fille s'y trouve.  Elle est plutôt mignonne!  Elle discute joyeusement avec... rien!  Elle parle à quelqu'un qui n'est pas là, je ne vois qu'une chaise devant elle.  Elle m'intrigue.  Je tente de comprendre ce qu'elle raconte, mais je n'y arrive pas.  Ma vision se trouble, tout devient gris.  J'embrasse du regard une dernière fois cette maison, car je n'y reviendrai peut-être jamais.


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